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14 février 2011 1 14 /02 /février /2011 01:38

Maurice Leroy a confirmé la tenue d'un Comité interministériel de la ville (CIV) en février, dont François Fillon assurera la présidence (lire article). Sans vouloir préjuger de ce qu'il en ressortira, tout indique que ce CIV s'apparentera plus à une routine administrative qu'à un vrai évènement de la politique de la ville. Plusieurs raisons expliquent ce scepticisme. Génétiquement, la droite ne croit pas à ce dispositif dérogatoire. Elle est honnête avec elle-même. Pour elle, le droit commun doit seul forcer le passage là où les inégalités de toute sorte s'enkystent. C'est une vision volontariste de l'action publique dont on sait qu'elle est démentie en permanence par les faits (ghettos scolaires, discriminations raciales, à l'embauche, freins à la mobilité, etc.). La droite s'appuie sur un projet de rénovation structurelle de l'économie du pays. A ses yeux, les faiblesses françaises relèvent d'un déficit criant de compétitivité des entreprises et seul un ajustement des fondamentaux de l'économie sur le modèle allemand pourrait permettre à la France de retrouver le chemin de la croissance, donc de l'emploi, enrayant ainsi la paupérisation des quartiers. Cette manière de voir est d'une grande clarté : la droite veut sortir de l'assistanat, de la mise sous oxygène de la pauvreté et du bricolage des contrats aidés qui n'offrent pas la possibilité d'un décollage de vie aux personnes qui en bénéficient.

C'est clairement à cet endroit que la crispation s'opère entre les partisans d'une approche sociale et ceux qui ne voient l'avenir qu'à travers le prisme économique. Pour poursuivre dans une vision binaire quelque peu archaïque mais présentant l'avantage de la limpidité, la gauche pense qu'il revient à l'Etat de permettre à chaque individu de retrouver le chemin de l'épanouissement. Que, seul, l'individu ne peut grimper les falaises à pic de l'affirmation sociale : vivre dans une relative quiétude citoyenne est une impossibilité notoire lorsque plusieurs facteurs défavorables se conjuguent et contrarient une telle espérance. Le mythe libéral, américain, du self made man est une construction fantasmatique, ébranlée par quelques exceptions hyper-médiatisées (boxe, football, rap, rarement chef d'entreprise).

Au passage, histoire de ne pas faire plaisir à tout le monde, la politique de la ville, dans sa réalité associative, ne doit pas oublier de se régénérer en interne pour démontrer qu'elle est en capacité d'être le juste moyeu entre le discours d'abandon qu'elle tient et les projets qu'elle porterait si elle était moins discréditée. La politique de la ville est une politique de l'audace. Elle perd de son intérêt dès qu'elle s'enlise dans une gestion plus administrative que novatrice. Il faut certes que les équipes DSU sentent le vent porteur d'élus avant-gardistes pour se sentir voler au-dessus des aspérités urbaines. Mais le fait que le vent soit une simple brise n'est pas une bonne excuse pour se détourner cette vitalité potentielle constitutive du génome « politique de la ville ».

Toutes ces considérations pour conclure au fait que la politique de la ville manque aujourd'hui d'une identité forte, d'un Etienne Pinte, d'un Pierre Cardo, d'un Philippe Dallier (UMP), d'un Claude Dillain, d'un François Pupponi (PS), d'un Christophe Lagarde (Nouveau Centre). D'une personne dont on n'aurait même pas à se demander si elle croit en ce qu'elle fait, ce qui est malheureusement, et peut-être injustement d'ailleurs, le cas de Maurice Leroy. Bien sûr, le choix de la personnalité n'est jamais neutre. Christine Lagarde connaît l'économie. Xavier Bertrand est féru de connaissances sociales. Brice Hortefeux colle à la police. Fadela Amara connaissait la banlieue mais elle était en résidence surveillée UMP. Mais, souvent, la politique de la ville ressemble à une case à remplir au nom des équilibres politiques à privilégier dans la continuité d'une victoire ou d'une défaite électorale. La gestion de la politique de la ville, en dehors de l'exception ANRU, ressemble à celle d'une caisse d'école où l'on compte les sous pour savoir si l'on peut louer les services d'un clown pour la kermesse de fin d'année. La cohésion sociale n'est même plus théorisée dans ce pays. Pis encore, la droite ne dit même pas si elle s'en fout, ou si elle la considère comme un sujet annexe, ce qui permettrait a minima le débat. La politique de la ville est tout simplement confrontée à un lent processus spectaculaire d'indifférenciation. Elle disparaît des écrans de contrôle de l'action de l'Etat. Hello papa tango Charlie.

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